Ce matin, ma mère a laissé un message sur mon répondeur. Elle me dit que ce week-end elle va voir mon grand-père, en maison de retraite depuis à peine un an. Sa santé décline de jour en jour. Pas étonnant, de mon point du vue : c'était un homme extrêment actif, volontaire, courageux. Toute sa vie il a fait des choix, pris des décisions, agit, le plus souvent dans l'intérêt d'autrui. Il a été heureux sans aucun doute, mais plutôt en donnant de lui-même qu'en profitant de la vie pour lui-même. Devenir inutile a été et reste certainement pour lui un calvaire, une aberration, quelque chose d'absurde dans sa conception de la vie. Il ne laisse pas ou peu le personnel s'occuper de lui, ne demande jamais d'aide, ne se plaint pas même quand il a de bonnes raisons de le faire. A mes yeux, il va mourir de ne pas avoir trouvé d'autre sens à sa vie que le don de soi. Rien d'anormal à cela au demeurant : mourir "de vieillesse" après une vie riche, bien remplie, heureuse dans l'ensemble. Il était et restera pour moi un modèle de morale, de justice, de courage. Il incarne cette foi qui déplace les montagnes, qu'on peut appeler volonté : aide-toi, le ciel t'aidera. Volonté qui manque si cruellement à mon père, au passage. Bien sûr il n'était pas un saint non plus, son extrême rigueur présente de sérieux inconvénients.