Famille de cinglés
Par Ermo le samedi 23 décembre 2006, 23h42 - Expériences - Lien permanent
Alors c'est un peu compliqué : j'avais écrit ce texte il y a une dizaine de jours (je viens de le mettre en ligne à l'heure où j'écris ceci). Mais après réflexion je ne l'avais pas mis en ligne tout de suite, parce que je sentais que quelque chose me tracassait par rapport à ça, sans vraiment savoir quoi. J'ai mieux compris le problème le lendemain : en fait j'étais un peu trop sûr de moi, je ne mesurais pas les difficultés qui allaient survenir.
Parce que le lendemain, ma mère m'appelait au téléphone, puis passait chez moi, pour me raconter ses malheurs : il s'avère que l'ambiance à son travail était devenue passablement dégradée, comme on pouvait s'y attendre (voir ici). Sa chef l'épie, lui reproche de ne pas faire certaines tâches (puisqu'elle omet volontairement de lui dire de les faire), la déconcentre de façon à la pousser à la faute, etc.
Sur un point précis il y a même un sérieux doute qu'elle (la chef) ait carrément saboté son travail pour pouvoir constater "l'erreur" ensuite. Mais comme ma mère est déstabilisée et manque de confiance en elle, elle suppose qu'elle a vraiment fait l'erreur, alors que, même moi, quand elle le raconte, je sens qu'il y a du louche (et comme par hasard une vérification totalement inhabituelle est effectuée, avec témoin).
Alors ma mère dit qu'elle ne peut pas supporter tout ça, que c'est trop dur, qu'elle (en) est incapable, qu'elle fait ou va faire plein d'erreurs, etc. Pourtant je crois qu'on peut dire que ma mère est en général assez courageuse et plutôt persévérante. Et de fait je crois qu'elle est parfaitement capable, mais c'est comme si elle avait un besoin vital de se plaindre (se faire plaindre peut-être ? non, je ne pense pas), de montrer combien sa situation (sa vie ?) est dure, de montrer tous les efforts qu'elle doit faire. C'est vraisemblablement sa façon à elle d'être "reconnue" : le goût de l'effort est certainement l'une principales valeurs que ses parents lui avaient enseignées. Je l'ai toujours connue plus ou moins comme ça, mais je me demande si cet aspect de son caractère n'est pas en train de "déborder", de prendre toute la place.
Il y a quelque chose de franchement déprimant, et à vrai dire d'assez dangereux, à écouter quelqu'un vous raconter ses problèmes, en les présentant comme insolubles, en insistant sur le fait qu'il est le seul à pouvoir et/ou devoir les affronter, comme si le destin voulait qu'il porte cette croix (évidemment trop lourde pour ses frêles épaules, si la personne en question sait présenter son cas de la façon la plus dramatique possible). Parce qu'on se trouve spectateur d'une grande misère à laquelle on ne peut rien : si son système est bien rodé, le "plaignant" se débrouille pour qu'effectivement on ne puisse pas vraiment l'aider. C'est la principale difficulté, puisqu'alors on va se sentir coupable, ne serait-ce que de ne pas avoir de problème aussi important, ou encore pire : d'être impuissant. Et si on se sent responsable, même partiellement, de la personne, du problème, ou même si on a seulement tendance à se sentir responsable de n'importe quoi en général, alors ce sentiment de culpabilité peut devenir assez profond, avec l'impression confuse d'être redevable à l'autre, qui s'arrangera évidemment pour qu'on ne puisse pas "rembourser cette dette" (n'importe quel usurier confirmerait sans doute qu'il vaut mieux qu'une dette ne soit pas remboursée, en tout cas pas trop vite).
Pourquoi moi ? Pourquoi ma mère s'adresse-t-elle à moi, et pas à mes soeurs ou à mon père, ou encore à des amis ? Et réciproquement : pourquoi je me sens obligé de l'aider à ce point ? Pourquoi je me sens responsable : l'écouter, la conseiller, faire cette longue lettre de réponse, et même au point d'essayer d'appeler son patron ? Culpabilité ? dette ? nécessité de remplacer mon père "absent" (comme toujours) ? J'étais en colère l'autre jour après elle, parce qu'elle refuse de se croire capable de se battre (ce qui est indispensable concrètement dans le cas présent), et parce que j'ai le vague sentiment qu'elle cherche inconsciemment à me mettre sur les épaules ce truc insoluble. Evidemment je ne peux pas l'envoyer promener (c'est d'ailleurs très difficile d'envoyer promener n'importe qui dans ce genre de situation, quand on a une conscience un peu trop exigeante). La seule solution est donc de trouver l'issue du problème qui permet de lui faire assumer le choix de se battre ou non (surtout ne jamais décider à la place des gens !), et si oui de l'aider (je m'acquitte de ma dette).
C'est ce que j'ai essayé de faire, et que je continue d'essayer, avec ma mère. C'est long, c'est chiant, mais je dois éviter de me mettre sur le dos cette dette invisible (j'en ai d'ailleurs probablement encore pas mal d'autres sur le dos). Parce que finalement c'est peut-être aussi ça qu'on appelle une mère castratrice : comment oserais-je prétendre avoir droit au "bonheur" (je lui mets des guillemets, à ce mot débile, bien fait pour sa gueule) si je me sens responsable de ma mère et de ses malheurs ?
Pfff, comme je dis souvent : "famille de cinglés"... Je parle de la mienne bien sûr, et je ne me gêne ni pour leur dire ni pour m'y inclure !
Commentaires
Commentaire décousu :
¤ BouH, pas cool cette chef. Ca lui portera pas chance, tu verras. En attendant ta mère trinque... :o(
¤ Au fait, bonne année et tout et tout !!!! Meilleurs voeux pour toi et tes proches, dont ta môman donc ! J'espère que 2007 vous apportera de bonnes choses.
¤ Pourquoi que tu viens plus écrire des notes pleines de mots ??
Merci Beside pour animer un peu mon ptit blog pas très dynamique !
Et bonne année à toi z'aussi et aux autres en même temps !
(quoique les coutumes de nouvelle année m'emmerdent un peu, mais c'est parce que je suis un peu "bizarre", ou snob, au choix)
Je viens justement de me remettre à écrire une note avec plein de mots dedans, il est vrai que je n'étais pas très prolifique ces derniers temps.
A vrai dire, ça peut paraître égoïste à mes chers lecteurs mais en fait généralement c'est plutôt bon signe pour moi quand je passe pas trop de temps sur mon blog : c'est que j'ai autre chose de mieux à faire, comme boire un coup avec des copains par exemple...
(pardon chers lecteurs et lectrices de préférer la compagnie de mes "vrais" copains plutôt que la vôtre : vous aurez compris que c'est ce "vrai" qui fait la différence)